Carola Rackete, nouvelle victime du fascisme décomplexé de Matteo Salvini ?

Le « Sea-Watch 3 » appartient à l’ONG allemande « Sea-Watch ». « De novembre 2017 à janvier 2018, à lui seul, le Sea-Watch 3 a été impliqué dans le sauvetage d’environ 1 500 personnes » selon le site Sea-Watch.org. L’Union européenne laisse filer le poison du nationalisme alors que le libéralisme philosophique devrait être primordial notamment en ce qui concerne la liberté de penser, mais aussi celle de circuler.

Aller contre les migrations, c’est remettre en question, ni plus ni moins, que l’ensemble de l’histoire de l’humanité. L’Australopithèque s’est déplacé en fonction des différentes contraintes de son temps afin d’assurer sa survie tant alimentaire que climatique. À cette époque lointaine, les frontières n’existaient pas et la vagilité[1]capacité à errer librement de tous était aisée ; de nos jours, ces dernières sont devenues des enjeux géopolitiques, mais ne sont en réalité que de simples lignes imaginaires.

Rappelons ici que l’homme est un animal, même si cela peut choquer au premier abord. Or, les animaux ne connaissent pas les frontières ; ils se déplacent au gré de leurs besoins et de leurs envies. Voyez l’exemple des animaux migrateurs, comme les oiseaux, qui peuvent parcourir des milliers de kilomètres afin d’hiverner sous des cieux plus cléments.

Les frontières ont été créées de façon totalement artificielle par l’être humain au moment de sa sédentarisation durant le néolithique. Les flux migratoires qui se sont perpétués au fil du temps ont été à l’origine de la fondation des nations. Attention, il ne faut pas confondre l’état et la nation, même si actuellement nous vivons dans des états-nations[2]https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tat-nation. Si l’on remonte l’histoire, on remarque que l’ensemble du continent européen s’est construit au gré des migrations, comme celle des « Francs », cette tribu germanique ayant déferlé sur la Gaule romaine. De façon plus générale, tous les continents ont subi le phénomène migratoire. Les courants néoconservateurs tentent de nier cette construction historique de la démographie en exacerbant le sentiment nationaliste d’une certaine population.



La fermeture des frontières va à l’encontre des Lumières. C’est manifestement l’antithèse des révolutions ayant eu cours aux XVIIIe et XIXe siècles. Les penseurs libéraux doivent se retourner dans leurs tombes. Le néoconservatisme tente de réécrire l’histoire sous un jour contre-révolutionnaire. Ce néoconservatisme du XXIe siècle, basé sur une société fermée, promeut le national-libéralisme ou encore le libéralisme à la carte. Comprenons bien qu’il s’agit en réalité d’un illibéralisme.  Au sens économique, c’est bien un libéralisme, mais au sens sociétal, c’est un anti-libéralisme qui va à l’encontre des droits fondamentaux comme ceux de la liberté de la presse, de la liberté d’expression, du droit à manifester et forcément de la liberté d’aller et venir, mais qui s’attaque aussi aux libertés des femmes notamment à celle de disposer de leur corps (droit à l’avortement, etc.).

Certains pays, comme l’Italie de Matteo Salvini, renient leur passé, tout comme le Rassemblement national le fait en France, cette extrême-droite qui a connu son apogée durant la période de collaboration avec le nazisme. 

Le fascisme du Duce n’a pas totalement disparu, Matteo Salvini en a revêtu les oripeaux. À la différence de Mussolini qui a fait pression sur le pouvoir en place avec sa « marche sur Rome », Matteo Salvini a été élu démocratiquement. Les démocraties libérales, si elles ne peuvent pas se défendre contre l’antilibéralisme et l’illibéralisme sont vouées à leur propre perte. Les régimes autoritaires sont le bras droit du capitalisme. Dans une démocratie libérale, toute interdiction de parti politique est impopulaire et ressentie comme une atteinte à nos libertés. Or, pour se défendre, une démocratie libérale devrait pouvoir attaquer à la racine les différents maux qui la menacent de désagrégation. On ne peut pas tout concéder aux intolérants au risque que ce soit eux qui gagnent le combat idéologique et remportent tôt ou tard les élections. Ces courants d’extrême-droite n’ont quasi qu’un cheval de bataille qui revient comme un leitmotiv : les flux migratoires. Parlent-ils de s’attaquer à la racine du problème ? Jamais ! Il s’agit toujours de s’en prendre aux seules victimes de l’immigration.



Les accords avec la Libye ont remis sur le devant de la scène la question de l’esclavage euro-méditerranéen. En France, l’esclavage est considéré comme un crime contre l’humanité depuis 2001. Dans les faits, la France et les autres pays européens participent à ce crime contre l’humanité au nez et à la barbe de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme — communément appelée Convention européenne des droits de l’homme (CEDH). Cette complicité de l’Union européenne, et de sa police des frontières extérieures — Frontex —, soulève de nombreux débats d’un point de vue éthique. De ce côté-ci de l’Atlantique, nous nous insurgeons de la création du mur de Donald Trump entre le Mexique et les États-Unis d’Amérique, mais l’Union européenne ne fait pas mieux. Le mur géographique et quasi infranchissable symbolisé par la mer Méditerranée est devenu un tombeau à ciel ouvert pour celles et ceux qui fuient la misère. Chaque année, ce sont des milliers de réfugiés qui y perdent la vie.

Pour résister aux néofascistes et à l’Union européenne, il faut que la question de la sauvegarde des réfugiés devienne primordiale. Le Sea-Watch 3 nous a donné une grande leçon d’humilité, d’humanité et de courage. Désobéir aux lois iniques allant contre les droits fondamentaux des êtres humains devient une nécessité face à la non-assistance à personnes en danger revendiquée par une Union européenne unanimement complice et décomplexée. Dernièrement, malgré l’interdiction du ministre de l’Intérieur Matteo Salvini et après plus de deux semaines d’errance en mer sans solution d’accostage, le Sea-Watch 3 a forcé la main de l’Union européenne et a finalement jeté l’ancre dans la nuit du 28 juin sur l’île italienne de Lampedusa. Carola Rackete, 31 ans et capitaine du navire, est désormais accusée de « résistance à un bateau militaire ». « C’est un acte criminel, un acte de guerre. Maintenant, nous l’avons arrêtée et elle va rester en garde à vue à Lampedusa », proclamait Matteo Salvini sur son compte Twitter[3]https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/migrants/italie-la-commandante-du-sea-watch-interpellee-a-lampedusa_3514641.html. En 2017 déjà, Pia Klemp, capitaine du Iuventa, voyait son navire confisqué ainsi que tous les ordinateurs et téléphones qui se trouvaient à bord. Aujourd’hui, elle risque 20 ans de prison en Italie — tout comme 9 autres membres de son équipage — sous le fallacieux chef d’inculpation de « suspicion d’aide et de complicité à l’immigration illégale »…

Si vous souhaitez soutenir ces femmes courageuses que sont Carola Rackete et Pia Klemp, des campagnes internet sont à retrouver ici.



References

References
1 capacité à errer librement
2 https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tat-nation
3 https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/migrants/italie-la-commandante-du-sea-watch-interpellee-a-lampedusa_3514641.html
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