Le féminisme face à la vague conservatrice
Le débat lors de la déposition de la QPC sur la loi abolitionniste sur la prostitution a montré que le féminisme avançait chaque jour. Le féminisme dit « pro-choice » a atteint ses limites. Sous couvert de défendre une vision féministe de la société, il défend en réalité une vision très conservatrice de la société. Le mouvement néolibéral a trouvé dans ce dernier un courant néoconservateur qui sous couvert du « libre-choix » soutient le masculinisme et le patriarcat.
La femme dans l’Église catholique, comme dans l’islam ou le judaïsme, doit s’émanciper davantage des textes religieux. Les courants libéraux restent très minoritaires. Des personnalités comme Delphine Horvilleur, femme rabbin, nous montrent la voie de la sagesse. Le fait qu’une femme soit rabbin démontre la révolution qui est en train de se faire au sein du judaïsme. Cela doit être un marqueur pour les autres religions. Les courants conservateurs font certes de la résistance en l’insultant ou en l’assimilant à une traîtresse pour sa communauté, mais Delphine Horvilleur permet de faire avancer la place de la femme dans la religion. Elle se considère comme juive et féministe contrairement à ce que l’on peut penser, elle n’est pas une féministe juive, mais bien une féministe laïque. Son courant de pensée universelle doit pousser les autres féministes des autres religions à poursuivre le chemin du libéralisme religieux. Ce dernier est émancipateur puisque l’analyse des textes religieux devient très moderne. Cela va de pair avec les femmes imams qui bousculent le vieux monde musulman en apportant le progressisme avec elles. Le patriarcat peut trembler puisque cela va, de plus en plus, se développer dans les années qui viennent. Les conservateurs y verront la marque de l’Occident, mais il s’agit avant tout d’émancipation et d’un rempart contre les courants intégristes qui promeuvent à longueur de journée le salafisme et le djihad.
Dans le catholicisme, il n’existe pas de femme curé ou prêtre. Le Vatican est le seul État à n’avoir aucune femme résidant sur son territoire. Le nouveau monde regarde le vieux monde. Le libéralisme religieux apparaît comme la modernité religieuse. La réforme protestante a permis aux femmes d’accéder à la fonction de pasteur. Pourquoi, une femme ne pourrait-elle pas être pape ? Tout simplement à cause des racines patriarcales qui fondent l’organisation de l’Église de Rome. Le pape a beau se targuer de jouer les réformistes, il ne fait rien pour accroître le pouvoir des femmes. Au contraire, il considère l’avortement comme « un culte du déchet » ou un « tueur à gages ». Cette politique ne peut que maintenir l’Église dans une logique réactionnaire. Pire, il a ordonné une réconciliation avec la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X. Le christianisme n’avancera pas dans ce cadre actuel. Il sera toujours obsolète.
Au moment où sonne la libéralisation de l’Église, le courant conservateur et traditionaliste issu du schisme de Vatican II recueille toujours plus de fidèles face à une crise géopolitique qui secoue l’Union européenne. Cette vague déferle sur tout le Vieux Continent à travers les groupuscules identitaires, une droite extrême toujours plus forte et une extrême-droite entièrement décomplexée. Nombreux sont ceux à vouloir introduire les racines chrétiennes de la France dans la constitution ou de garantir la liberté d’enseignement à travers le renforcement de la loi Debré qui permet le financement des écoles religieuses par l’État. Il s’agit d’une entorse grave à la laïcité qui a permis à près de 1 000 Mds d’euros d’être détournés de l’enseignement public depuis 1959.
Cette poussée profondément antiféministe qui pourtant se prétend « féminine » ne souhaite pas la parité entre les hommes et les femmes ou encore l’égalité des salaires pour les êtres humains à travail égal. Pire, elle souhaite reléguer la femme aux tâches domestiques de la maison pour en faire une bonne mère de famille. Ce flot réactionnaire séduit de plus en plus de personnes au point de remettre en cause le progressisme comme cause de l’effondrement de la société. Le capitalisme a des armes très solides pour se défendre. Il déplace sans cesse les discussions pour mieux continuer son travail de sape de la société. Leur lecture de la religion est un moyen pour les faibles d’esprit de s’accrocher à quelque chose lorsque le capitalisme est en crise systémique. Or, depuis près de quarante ans, le capitalisme est en crise systémique et ne connaît aucune prospérité permettant d’endiguer cette réaction. Les réactionnaires font la croisade contre l’islam qu’ils jugent dangereux pour l’intérêt de la nation, mais ne voient pas que leur croyance est aussi obsolète que celle de l’islam si l’on prend le temps de lire les textes. En effet, l’obscurantisme des uns cache l’obscurantisme des autres. Le temps des croisades et des massacres est bien terminé depuis longtemps. Jérusalem est une ville internationale qui pourrait être la capitale de deux États dans le futur.
Si le nombre de religieux continue de croître dans les prochaines années, il semble nécessaire de stopper la vague conservatrice à laquelle nous assistons en promouvant le libéralisme au sens philosophique. Ouvrir les religions aux femmes permettrait d’endiguer l’extrémisme religieux et de retrouver le progressisme loin des cul-bénis.