Les personnes, lisent-elles les articles avant de les commenter ?

Dans mon dernier article, je parlais d’une question de fond sur les Gilets jaunes et de la théorie de Keynes à propos de la politique de la demande. Je le diffuse en boucle sur Facebook, mais quelque chose cloche. Les commentaires ne sont pas en adéquation avec le contenu de l’article. En définitive, les commentateurs semblent ne pas avoir lu l’article. De nombreuses personnes s’accomodent du titre et au mieux du chapeau. C’est vraiment dommage.



Lorsqu’un auteur écrit un article c’est pour qu’il soit lu et a fortiori génère des profits à travers les publicités mises en place soit pour payer ses articles, soit pour payer les différents frais de gestion du site internet. En commentant sans lire, le lecteur s’inscrit dans une paresse intellectuelle : il n’a pas le courage de pousser plus loin et de cliquer sur le lien pour lire le contenu dans son intégralité.

Dès lors, le fait d’écrire un  commentaire sans avoir pris connaissance de l’article dans son entier entraîne un certain paradoxe. Comment le commentateur, peut-il émettre une opinion, un avis ou même des insultes sans même s’être informé de la teneur exacte de l’article ? Le lumpenprolétariat ne fait même pas l’effort de lire l’article. Pourtant, on nous apprend à lire et à décortiquer des textes et donc des articles du collège au lycée. Il y a donc une certaine veulerie de la part de ce « lectorat » quel que soit son niveau d’études. Réaliser un commentaire de texte nécessite une certaine connaissance en matière de culture générale. Le lumpenprolétariat que forment les Gilets jaunes ainsi que d’autres mouvements s’arrête au résumé de l’article et parfois au résumé du résumé de l’article. Comment alors être certain que ces personnes ont compris l’article ? Avec les réseaux sociaux, elles sont de plus en plus nombreuses à commenter directement sur Facebook ou sur Twitter, mais leurs commentaires sont à côté de la plaque quand ils ne sont pas haineux. Je note, d’ailleurs, qu’il y a très peu de personnes qui font l’effort de commenter sur le site internet à travers l’outil « commentaires ».

Au final, l’auteur n’est pas récompensé pour le travail qu’il réalise. Pour écrire un article, il faut environ une journée. Il s’agit en fin de compte de remettre en cause le travail effectué. Je ne suis pas le seul puisque « les trolls » le font sur tous les réseaux sociaux, sur des blogs ou des sites d’information. C’est ce que disait Slate [1]Cyril Simon, « Une majorité d’articles sont partagés sur les réseaux sociaux sans même être lus », Slate, le 20 juin 2016, consulté le 19 février 2019, [En Ligne], URL … Continue reading il y a de cela presque 3 ans.



Pour pallier cette inertie du lectorat, de nombreux journaux utilisent la technique dite du putaclic, c’est-à-dire qu’ils mettent en avant un titre racoleur au possible pour pousser les personnes à cliquer sur le lien. Le problème, c’est que le titre est, trop souvent,  en inadéquation totale avec le contenu de l’article. Nous allons dès lors vers un journalisme qui perd ses valeurs déontologiques. En effet, l’appât du gain pousse les éditeurs à oublier la question du mérite, mais aussi se résume à faire de courts articles négligeant les enquêtes de fond pourtant utiles à la société et à la démocratie. Le journalisme est un contre-pouvoir très important dans une démocratie libérale. Les scandales révélés par des journaux comme l’Humanitéle Canard enchaîné et Médiapart participent à être le quatrième pouvoir de la République.

Il existe aussi une défiance de la part des citoyens vis-à-vis des médias. Sur les réseaux sociaux, de nombreuses personnes usent du néologisme de « merdia » qui mixe les termes « merde » et « média ». Ils considèrent que les médias ne sont pas objectifs et diffusent une opinion. Or, un média a une ligne éditoriale qui est foncièrement politique. La neutralité dans la presse n’existe pas, tous les articles sont subjectifs dans des journaux d’opinion comme Le FigaroBFM-TV ou encore Le Point. Il faut dire que ces derniers respectent la « Charte de Munich ». Avec la financiarisation de la presse, l’indépendance des journaux est menacée. Les journalistes s’auto-censurent. Cela pousse certains citoyens à créer leurs propres médias que l’on appelle des  « altermédias ». À l’intérieur de leurs colonnes, on ne retrouve pas la même rigueur journalistique et de nombreuses  « fake-news » ou « infox » y fleurissent brossant dans le sens du poil leur lectorat. Ils écrivent ce que veulent lire les lecteurs, nous ne sommes plus en présence d’« altermédias », mais d’organes de propagande.

La loi du 29 juillet 1881 portant sur la liberté de la presse ne parle pas — bien évidemment —  des blogueurs, ces grands oubliés, qui réalisent néanmoins des travaux d’investigation de qualité pour lesquels ils ne sont pas forcément rétribués. Au moment où Emmanuel Macron souhaite mettre en place un comité de pilotage des journaux comme pour la Pravda afin d’affirmer quelle vérité est bonne à dire et comment sanctionner les journaux qui ne diffuseraient pas cette vérité, il apparaît urgent qu’un conseil déontologique de la presse soit instauré.



References

References
1 Cyril Simon, « Une majorité d’articles sont partagés sur les réseaux sociaux sans même être lus », Slate, le 20 juin 2016, consulté le 19 février 2019, [En Ligne], URL : http://www.slate.fr/story/119811/reseaux-sociaux-lisent-titre
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