Le chômage et le Volume Horaire de Travail
Dans une économie de marché, le contrat dispose le nombre d’heures que l’employé doit effectuer dans la semaine, le mois ou l’année. L’objectif du gouvernement consiste à faire baisser le taux de chômage. Or, une personne avec un emploi comportant 10 à 35 heures ou plus est considérée comme un chômeur en moins. Ce qui pose la limite du raisonnement par le taux de chômage.
1- Les limites du taux de chômage
La question du chômage apparaît comme l’un des objectifs fondamentaux en matière des politiques économiques et sociales. La baisse du taux de chômage devient dès lors une priorité plus ou moins absolue pour les différents gouvernements successifs, qu’ils se considèrent comme de «droite», de «gauche», ou encore plus récemment «ni de droite, ni de gauche». Au moment où sont mises en avant les différentes ordonnances concernant la réforme du marché du travail censées faire baisser structurellement le chômage, il convient de s’intéresser à la question même de l’analyse du chômage, mais aussi de faire face à une baisse artificielle et non-réelle.
Le chômage ne se défini pas de la même manière d’un pays à un autre, mais aussi d’un pays au niveau de ce que décrit le BIT (Bureau International du Travail).
Le BIT considère que pour être sans emploi, il faut «ne pas avoir travaillé au moins une heure durant une semaine de référence ; être disponible pour prendre un emploi dans les 15 jours ; avoir cherché activement un emploi dans le mois précédent ou en avoir trouvé un qui commence dans moins de trois mois» [[Insee, Chômeur (BIT), 13 octobre 2013, URL = https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1129]]. Pôle Emploi définie le taux de chômage selon cinq catégories (A, B, C, D et E). La catégorie A se caractérise par «personne sans emploi, tenue d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi, à la recherche d’un emploi quel que soit le type de contrat ( CDI,CDD, à temps plein, à temps partiel, temporaire ou saisonnier)» [[Direction de l’information légale et administrative (Premier ministre), Chômage : quelles sont les catégories de demandeurs d’emploi ?, 08 décembre 2015, URL = https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F13240]]. Ainsi, la catégorie A apparaît plus proche au sens de la définition du BIT. Pourtant, les courbes de Pôle Emploi et de l’Insee diffèrent. Par exemple, la catégorie D se traduisant par «personne sans emploi, qui n’est pas immédiatement disponible, non tenue d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi (demandeur d’emploi en formation, en maladie, etc.)» [[Idem]]. Ainsi, une baisse de la catégorie A vers la catégorie D fait baisser mécaniquement le chômage, puisque le chômage baisse au sens du BIT, pour autant la personne est sans-emploi. On considère toutefois que les courbes sont bien différentes, elles se complémentent entre elle.
Dès lors, un débat de fond vient à justifier la différence le fait d’être sans-emploi : personne ne faisant pas de recherche active, étant en formation, ou même radié par Pôle Emploi, et la question du chômage : personne sans-emploi faisant des recherches actives. Ainsi, le chômage trouve une limite puisqu’il prend en considération qu’une partie des personnes sans-emploi.
Le Halo du chômage n’est pas intégré dans le taux de chômage. En effet, les personnes souhaitent travailler, mais ne font plus de recherches. Ainsi, elles ne rentrent plus dans la catégorie du chômage. En 2015, on considère que près de «1,4 million forment le halo autour du chômage» [[Anne-Juliette Bessone, Pierre-Yves Cabannes, Anis Marrakchi, «Halo autour du chômage : une population hétérogène et une situation transitoire», INSEE, 05 juillet 2016]].
Sur le Halo du chômage, il existe trois composantes :
- Composante 1 : les personnes qui recherchent un emploi, mais ne sont pas disponibles
- Composante 2 : les personnes qui sont disponibles et souhaitent travailler, mais ne recherchent pas d’emploi
- Composante 3 : les personnes qui, bien que déclarant souhaiter travailler, ne sont pas disponibles et ne recherchent pas d’emploi
Le taux de chômage pour le mois de juillet apparaît aux alentours de 9,2%. Le chômage en France apparaît dès lors comme structurellement inférieur à la réalité et ses chiffres sont clairement faussés. Le taux de chômage a atteint ses limites.
Pour un autre taux de chômage, il convient de se baser sur les «personnes inactives cherchant ou souhaitant un travail». Cela permettrait de prendre en compte d’une part certaines composante du «Halo autour du chômage», de recouper avec les éventuelles statistiques du Revenue de Solidarité Active (RSA).
2- La création d’emplois à travers le Volume Horaire de Travail
Comment connaître si des emplois ont été créés sur une période donnée ? Il s’agit d’une question importante.
Une économie dynamique est créatrice d’emploi, une économie en crise détruit des emplois. Il s’agit d’affirmer que lorsque l’économie est dynamique : création>destruction, alors que lorsqu’elle est en crise ou en dépression : destruction>création. La «création destructrice» de Schumpeter pousse les différents gouvernements à adopter vers un marché du travail plus flexible. Dans certains pays, la flexibilité n’est pas assuré d’un volet sécurité comme c’est le cas pour la France, où on assiste à une flexibilité qui attire l’ensemble des salariés vers une baisse de la protection sociale et une chute des salaires. Moins de protection des emplois ne rime jamais avec plus de protection des salariés.
La question principale est de connaître le nombre d’emplois créés chaque mois, voir chaque trimestre, sans se baser des définitions du chômage, puisque nous l’avons vu ces derniers sont structurellement incomplètes.
Par exemple, 35 emplois de 1h00 par semaine créés, au sens du BIT cela fait 35 chômeurs en moins, alors que concrètement, il s’agit uniquement d’un emploi créé. Il s’agit d’une certaine manière de détourner les statistiques. De nombreux pays se targuent de faire baisser le chômage, alors qu’ils ne font que partager le temps de travail vers des contrats à temps-partiel, voir à mi-temps. D’ailleurs, toutes les analyses du chômage du chômage d’un pays à l’autre ne dépendent pas des mêmes définitions.
Cela pose l’importance sur la variation du volume d’heures travaillées au cours d’un mois dans un pays, mais aussi la variation du taux de chômage. Alors que la variation du volume d’heures travaillées d’un mois sur l’autre ou d’une année sur l’autre met en évidence la capacité du nombre d’emplois crées.
On peut définir le nombre d’heures travaillées dans l’année telle que :
$Duree_moy=7\times5\times Nbre_semaine-7\times Nbre_CA-7\times Nbre_JF$ [[Nous travaillons sur une journée de 7 heures théorique, auquel il faut supprimer les congés payés, mais aussi les jours fériés. À savoir que ces jours fériés en semaine c’est-à-dire ni le samedi, ni le dimanche dépendent d’une année sur l’autre. Pour l’année 2017, 9 jours fériés ont lieu en semaine, 2 jours ont lieu le week-end, alors que l’année 2019 il y a 10 jours fériés en semaine. Cela abouti à ce que la durée légale du temps de travail annuel sans les journées supplémentaires, les jours travaillés le week-end et les jours fériés pour certaines profession varie d’une année sur l’autre.]].
Ainsi, $Duree_legale(2017)=7\times5\times52-7\times25-7\times9= 1820-175-63=1582$
Pour 2018, il y a autant de jours fériés, mais pour 2019, il 10 jours fériés dans la semaine. Donc :
$Duree_legale(2019)=7\times5\times52-7\times25-7\times10= 1820-175-63=1575$
Ainsi la création du nombre d’emplois réels résulte de la formule suivante :
$Nbre_emplois(n)$ = $\Delta(VHT_n)\over Duree_legale$. (1)
On concèdera que le nombre d’heures travaillées dans l’année n’est pas de 1577 heures en moyenne entre 2012 et 2017. Deux chiffres s’y opposent. Tout d’abord, la moyenne de l’ensemble des salariés avec des contrats partiels et à temps-pleins se situe aux alentours de 1521 heures, alors que la durée annuelle moyenne pour les salariés à temps plein se situe à 1 646 heures. Cette augmentation significative résulte des heures supplémentaires effectuées par ces salariés. [[Jérôme de Tychey, «Document de travail n°59 : La durée effective annuelle du travail en France et en Europe», Coe-Rexecode, juin 2016]].
Dans le cadre de la précédente méthodologie mise en avant ci-dessus, on peut se baser sur les chiffres de l’Insee pour commencer une première approche.
Année | Trimestre | VHT | Δ(VHT) |
2012 | T1 | 8811,3 | 0 |
T2 | 8791,5 | -19,8 | |
T3 | 8773,4 | -18,1 | |
T4 | 8751,8 | -21,6 | |
2013 | T1 | 8738,4 | -13,4 |
T2 | 8729,7 | -8,7 | |
T3 | 8732,9 | 3,2 | |
T4 | 8739,5 | 6,6 | |
2014 | T1 | 8744,4 | 4,9 |
T2 | 8748,7 | 4,3 | |
T3 | 8749,8 | 1,1 | |
T4 | 8743,1 | -6,7 | |
2015 | T1 | 8745,7 | 2,6 |
T2 | 8754,6 | 8,9 | |
T3 | 8769,6 | 15 | |
T4 | 8789,5 | 19,9 | |
2016 | T1 | 8801 | 11,5 |
T2 | 8818,6 | 17,6 | |
T3 | 8837,8 | 19,2 | |
T4 | 8869,1 | 31,3 | |
2017 | T1 | 8907,2 | 38,1 |
T2 | 8940,2 | 33 |
Sur l’analyse de VHT, nous distinguons deux périodes :
- de T1 2012 au T2 2014 : VHT décroît
- de T3 2013 au T2 2017 : VHT croît (sauf pour le T4 2014)
Dans le tableau ci-dessus, il convient de noter que d’après (1) :
- $Duree_legale(2012)=1589$
- $Duree_legale(2013)=1575$
- $Duree_legale(2014)=1575$
- $Duree_legale(2015)=1575$
- $Duree_legale(2016)=1568$
- $Duree_legale(2017)=1582$
Il en suit cinq séries de tableau :
Trimestre | Δ(VHT) | Emploi créés |
T1 | 0 | 0 |
T2 | -19,8 | -12 461 |
T3 | -18,1 | -11 391 |
T4 | -21,6 | -13 593 |
Trimestre | Δ(VHT) | Emploi créés |
T1 | -13,4 | -8 508 |
T2 | -8,7 | -5 524 |
T3 | 3,2 | 2 032 |
T4 | 6,6 | 4 190 |
Trimestre | Δ(VHT) | Emploi créés |
T1 | 4,9 | 3 111 |
T2 | 4,3 | 2 730 |
T3 | 1,1 | 698 |
T4 | -6,7 | -4 253 |
Trimestre | Δ(VHT) | Emploi créés |
T1 | 2,6 | 1 651 |
T2 | 8,9 | 5 651 |
T3 | 15 | 9 524 |
T4 | 19,9 | 12 635 |
Trimestre | Δ(VHT) | Emploi créés |
T1 | 11,5 | 7 334 |
T2 | 17,6 | 11 224 |
T3 | 19,2 | 12 244 |
T4 | 31,3 | 19 962 |
Trimestre | Δ(VHT) | Emploi créés |
T1 | 38,1 | 24 083 |
T2 | 33 | 20 859 |
De 2012 à 2017, plus de 82 000 emplois à temps-plein ou en équivalent temps-plein ont été créés sur l’ensemble de l’Hexagone. On constate également une un croissance relative de Δ(VHT) se traduisant inexorablement par une augmentation de la création d’emplois.
Il convient d’affirmer que la courbe du taux de chômage ne s’inverse pas, puisque l’inverse en mathématiques se résume à $f(x) = \frac 1x$
Tous les différents chiffres de l’Insee indiquent que le $Nbre_emplois(reel)>Nbre_emplois(theorique)$. La base de 35h00 (théorique) crée moins d’emplois que les emplois annoncés par l’institut de statistique. Cela repose sur le fait que les emplois créés se font largement à des contrats temps partiel. L’une des particularités résident dans le fait que les entreprises tendent à adapter leur quantité de travail face à la production ou dans le commerce en fonction de l’augmentation des ventes. Il s’agit d’une adaptation de l’employeur de manière spontanée face à une demande croissante ou temporaire. Il s’agit d’emplois typiquement conjoncturels, alors que les emplois structurels sont des CDI en temps pleins, et non en CDD à temps partiel.
Mettre en avant des emplois conjoncturels expose les salariés à un risque majeur
en cas de secousse financier, ou de Krachs boursiers. La facilité des employeurs pour y mettre fin peut réellement inquiéter.
Une des grandes mesures du patronat réside dans l’augmentation du temps de travail, ou de reléguer celui-ci dans l’entreprise. Si ces derniers embauchaient en temps complet chaque salarié, le débat pourrait commencer au-lieu de parcelliser l’emploi.