Pour l’euthanasie active

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L’Assemblée Générale de l’ADMD (L’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité) vient de se terminer à la Rochelle. Il s’agit d’une occasion de traiter le sujet de l’euthanasie et de choisir les modalités sur la fin de sa propre vie. L’euthanasie pose une question évidente dans la médecine et la bioéthique d’un point de vue éthique, spirituelle voir religieuse tout comme philosophique.

Où en sommes-nous ?

La loi Leonetti dans sa version consolidée de 2016 sur la fin de vie permet l’arrêt des traitements curatifs à travers une décision collégiale dans le cadre d’un acharnement thérapeutique [[L’alinéa 2 de l’article L. 1110-5-1 du Code de Santé Publique énonce que «La nutrition et l’hydratation artificielles constituent des traitements qui peuvent être arrêtés conformément au premier alinéa du présent article»]]. Dans la mesure du possible, la validation du fait que l’ensemble des soignants et des médecins de cet acharnement se réalise par une réunion de service hebdomadaire que l’on appelle «le Staff».

Je pense que la provocation d’une mort par la faim et la soif va à l’encontre des principes fondamentaux sur le respect de la dignité humaine. Sous des principes de mettre fin à des souffrances importantes, la volonté d’interrompre les besoins fondamentaux au sens de Virginia Henderson, mais aussi dans les besoins vitaux dans la logique Maslow. Le besoin de «boire et manger» s’inscrit dans la même logique que «respirer» ou encore «éliminer». Couper l’un de ses besoins conduit inévitablement au décès du patient. Dans le cadre présent, la création d’une déshydratation tout comme la dénutrition s’inscrit dans une logique contraire aux soins que peut apporter un soignant. En effet, le soignant doit soigner et non recourir à des pratiques s’inscrivant à la limite de la torture physiologique. L’arrêt de l’hydratation sous forme de perfusion, ou d’alimentation en voie entérale ou parentérale ne crée pas le décès du patient immédiatement. La question de l’immédiat et celle du temps importe dans le débat sur l’euthanasie. Dans les faits, les conséquences sont importantes et multiples. Le fait de provoquer la mort de manière indirecte par ce moyen semble créer une souffrance irrémédiable pour le patient ayant peu de conscience, mais cela interagit directement avec ses organes. La provocation du décès du patient se base sur l’épuisement des organes, mais aussi provoquer d’autres conséquences comme la création d’un coma lié à la déshydratation. Faut-il ou non traiter le coma ou laisser la personne s’y enfoncer durablement ?



Toute la problématique reste que si l’idée de terminer les souffrances apparaît comme utile, l’acharnement thérapeutique débouche aujourd’hui sur une fin de vie particulièrement indigne. Le mieux reste effectivement de passer en soins palliatifs afin que l’arrêt des traitements ne provoque pas une souffrance très importante au patient, mais aussi à sa famille. Les soins palliatifs signifient la mise en place de soins de confort pour accompagner la personne vers son décès. Il s’agit de stopper tous les soins curatifs. Peut-être que le sens d’acharnement thérapeutique tel qu’il devrait être développé nécessite de déboucher sur des soins palliatifs. S’il existe des Unités de Soins Palliatifs (USP) et équipes mobiles de Soins Palliatifs (EMSP), mais aussi des réseaux de soins palliatifs. Si des progrès se réalisent progressivement vers l’intégrité du patient et de sa dignité, des progrès sont encore à faire. Les modalités actuelles ne sont pas admissibles. L’euthanasie passive ne permet pas une fin de vie digne.

De plus, dans de nombreuses circonstances, l’avis du patient n’est point pris en compte [[Il semble nécessaire que «la personne de confiance» soit obligatoire pour chaque hospitalisation. Dans le cas où le patient ne pourrait décider par lui-même, il convient à ce que cela le conjoint, puis ensuite les enfants de la personne. Les directives anticipées doivent être obligatoires. Dans le cas où rien n’est inscrit dessus selon l’avis du patient, il convient d’autoriser l’ensemble des décisions médicales est prises par l’équipe médicale lorsque celui-ci n’est plus en mesure de décider.
Dans le cadre d’une euthanasie passive, les personnes de confiance doivent pouvoir démontrer la position du patient dans le cas où celui-ci n’a pas laissé de directives anticipées. La personne de confiance ne s’apparente pas à la position de la famille quand celle-ci est unie. En l’occurrence, lorsque la personne de confiance l’a démontré, cela aboutit à une «procédure collégiale».]] pose un problème au niveau du respect de la vie privée. Le tiers prend les décisions dans l’intérêt du patient. Toutefois, dans les urgences vitales, l’avis du tiers n’est pas pris en compte. La déontologie s’applique pour sauver la personne.



Le cas de Vincent Lambert a largement été médiatisé. Il oppose des parents ancrés dans une logique traditionaliste et intégriste au niveau religieux et spirituel à sa femme. Le débat s’était installé dans le paysage médiatique, mais aussi au niveau politique. Le mieux reste d’avoir toujours des directives anticipées que de créer des souffrances inutiles pour le patient, la famille, mais aussi l’ensemble du personnel soignant.

La médecine a pour vocation de soigner, mettant en soins palliatifs lorsque la personne est condamnée, mais sans jamais donner la mort. Le serment d’Hippocrate tel que le Conseil National de l’Ordre des Médecins traduit cette volonté [[mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux. […] J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité.]] de soigner, mais lorsque les soins n’aboutissent à rien, la question éthique intervient.

On pourrait poser la question plus profonde des raisons qui poussent à accepter l’euthanasie des animaux et pas les êtres humains ?



La réalité de l’euthanasie

L’euthanasie fait débat, puisque nous sommes dans les frontières de la médecine. Si le médecin et l’ensemble des équipes médicales et paramédicales promeuvent «le droit à mourir digne», alors qu’en sera-t-il du serment d’Hippocrate sur le fait «de promouvoir la santé dans tous ses éléments».

En l’occurrence, de nombreux procès s’ouvrent sur des soignants mettant fin aux souffrances des patients. Sans une législation sur le droit à une fin de vie digne, les Cours d’Assise jugent l’euthanasie comme des Homicides volontaires avec préméditation, dont les peines restent très lourdes. Le problème reste que l’euthanasie relève de nombreuses incohérences. Derrière ce mot se retrouve de véritables homicides, dans son contraire des abrogations de souffrance voulue par le patient. Pour la Justice les deux cas sont traités de la même manière à savoir d’un homicide. Dès lors, l’intention de tuer est mise au même niveau que celle d’abroger les souffrances d’un patient qui le demande. À défaut d’avoir un Code de Santé Public adapté au XXIème siècle, les dossiers débouchent sur du droit pénal. Nous sommes face à une forme de criminalisation du soignant. Ces procès spectaculaires cachent l’envers du décor, l’euthanasie est quotidienne et reste pratiquer dans l’obscurité par des soignants et des équipes médicales avec ou sans accord des familles ou du patient.

On peut dire clairement que l’hypocrisie domine le débat, puisque dans des secteurs comme la réanimation médicale, les arrêts de traitement reste nécessaire lorsque la personne ne peut-être sauvée. La cadence et la volonté de faire du chiffre, tout comme la libération d’un lit permet de sauver d’autres vies.



Concrètement, les méthodes actuelles permettent de soulager, mais aussi de respecter les dernières décisions à savoir le droit de choisir la manière de son propre décès, selon des circonstances bien précises. Dans nos pays voisins (Belgique et Pays-Bas), des produits létaux sont injectés aux patients, afin de provoquer le coma et l’arrêt cardio-respiratoire dans un temps court : entre 30 à 60 minutes après le début de l’opération médicale.

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