François FIllon charge la Justice pendant une conférence de presse
La journée de jeudi aura été riche en émotion. Le 1er mars, François Fillon, dans un communiqué de presse a annulé sa visite au Salon Internationale de l’Agriculture prévu à 8h00.
Le candidat à la présidentielle du parti “Les Républicains”, après tout un ensemble de quiproquo, a affirmé qu’il allait être
Depuis le début, je n’ai pas été traité comme un justiciable comme les autres, a-t-il déploré, avant de développer. On le voit au simple choix de cette date du 15 mars, deux jours avant la clôture des parrainages, entièrement calculée pour m’empêcher d’être candidat à la présidentielle.
Pourtant, il avait confié, il y a un peu plus d’un an que la Justice devait être rapide, donc expéditive. Que les lois se résumaient être les règles, et que les contournements de la Loi devaient être sévèrement punis.
Ces paroles vont à l’encontre de l’article 434-25 du Code Pénal. Puisqu’elle jette en discrédit l’institution judiciaire. Une contradiction par rapport au tweet ci-dessous.
Une justice rapide et ferme est une nécessite absolue que vous réclamez. L’impunité zéro doit être la règle ! pic.twitter.com/Py0Z2wW6fG
— François Fillon (@FrancoisFillon) 10 mars 2016
Pourquoi François Fillon critique-t-il une enquête judiciaire, si “l’impunité zéro se doit être la règle” ? Il y a une volonté très manifeste de contourner des faits qui sont exposés. Le calendrier judiciaire doit-il s’adapter au calendrier électoral ? Non, puisque “le faire” signifie rompre le principe même de l’égalité des citoyens devant la Justice. Pourtant, la campagne “filloniste” sous fond de complot semble ne fonctionne pas. Il n’y a pas de calcul électoral.
L’état de droit a été systématiquement violé. La présomption d’innocence a complétement et entièrement disparu. Nombre de mes amis politiques, et de ceux qui m’ont soutenu à la primaire et ses quatre millions de voix, parlent d’un assassinat politique.
La question si chère de l’état de droit revient sur le devant de la scène. Le droit sert à attaquer, mais aussi à se défendre. François Fillon est pris dans une affaire judiciaire, dont la question de la défense ne semble pas vraiment le préoccuper. En ce qu’il concerne la présomption d’innocence, ce dernier reste un accusé, et il n’a pas été condamné. Jusqu’à présent, il est innocent, mais créer des articles à charge ne met pas en cause cette présomption. L’utilisation du “chantage” comme un argument se traduit justement par un manque de sérieux dans cette affaire. D’autant que ce dernier est puni par l’article 312-10 du Code Pénal.
Il affirme également que sa situation se résume à un “assassinat politique”. Les mots employés par le candidat sont très forts, et en totale contradiction avec la situation. Jusqu’à présent, aucun médecin n’a constaté le décès de François Fillon. Ipso Facto, il est toujours vivant. Cela contraste également avec l’assassinat politique, dont on citera celui de Jean Jaurès, si réformiste, soit-il, ou encore des trois kurdes (Fidan Dogan, Leyla Soylemez et Sakine Cansiz) exécutées en 2013 par les islamistes des Renseignements intérieurs turcs.
La volonté de se considérer comme une personne “décédée” ne relève plus de la politique, mais bien la psychiatrie. Il ne s’agit pas de le rééduquer ou autre, mais bien de le soigner. Puisque ce dernier est en train de développer une psychose et une paranoïa vis-à-vis des personnes qui ne partagent pas son point de vue. Il n’arrive plus à faire la différence entre une personne “décédée” et une personne “vivante”.
Les actes de François Fillon le poussent aussi à une forme de suicide “politique”. Dans le sens qu’il s’écarte progressivement des électeurs potentiels. Sa carrière politique semble être particulièrement terminée. Il ne peut que s’en vouloir.
De plus, le resserrement entre les électeurs de François Fillon et ceux de Marine Le Pen s’inscrit dans la logique réactionnaire et conservatrice des deux projets politiques. Si ces derniers semblent être différents, les mesures libérales et sociétales y sont totalement solubles. D’ailleurs, pour beaucoup de Fillonistes, Marine Le Pen reste le “Plan B” en matière de solution politique.
Enfin, ce n’est pas quatre millions de voies qui l’ont soutenu à la primaire, mais bien 2,9 millions de personnes. Il s’agit d’une erreur de près 37 %. Ainsi, on peut clairement dire qu’il s’agit d’une confusion entre le nombre de votants à la primaire et le nombre de votants pour François Fillon. Cela se traduit manifestement par la volonté de gonfler artificiellement les chiffres. D’autant qu’avec les défections dans le camp “Fillon”, le chiffre est au plus bas.
Je ne céderai pas. Je ne me rendrai pas. Je ne me retirerai pas. J’irai jusqu’au bout parce qu’au-delà de ma personne, c’est la démocratie qui est défiée.
François Fillon a pris la décision de ne pas se retirer face à ce scandale politico-judiciaire. L’un de ses arguments est que lorsque la Justice fait son travail, la “démocratie est défiée”. Dans ce cadre précis, il s’agit de combattre la Justice. En effet, un pays sans Justice (ou système judiciaire rattaché au ministère de l’Intérieur) est vu comme une démocratie. De facto, François Fillon rompt brutalement avec la tradition républicaine, et la DDHC de 1789 via son article 16 : “Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n’est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution”.
Une attaque particulière qui n’a pas vraiment fait rire le Syndicat de la Magistrature (classé à gauche) et l’Union Nationale des Magistrats (classée à droite). Il s’agit de toute la magistrature toute tendance politique confondue qui montre au créneau pour défendre la Justice. Le complot des “juges rouges” paraît loin.
La France est plus grande que nous. Elle est plus grande que mes erreurs.
La logique de la phrase tend effectivement vers le nationalisme. La grandeur de la France va de paire avec le patriotisme également. Les erreurs de Fillon sont ipso facto considérées comme inhérentes. Il s’agit d’un déni profond mettant en dynamique un jeu avec ses collègues et voisins du Front National.
La question des affaires se pose encore une fois vis-à-vis de ses Tweets.
Je dis aux Français : jugez-moi sur mon parcours. #FillonNîmespic.twitter.com/0fCaxZ5r5e
— François Fillon (@FrancoisFillon) 2 mars 2017
Qu’importe, pour les conservateurs, un programme incarnant le “Blitzkrieg”. Ces fanatiques, incarnant les références de l’extrême-droite libérale, sont prêt à tout, y compris à condamner la Justice et vouloir le ministère de l’ordre, comme le souhaitait Xavier Bertrand : “Je pense qu’il nous faudra un seul et fort ministère de l’Autorité”. Et hop, fini la Justice, la Police fera sa loi “pour éviter qu’on ait le sentiment que, quand les policiers font leur travail, ceux qu’ils arrêtent sont bien souvent relâchés“. C’est le début de la fin de la Vème République.
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