Le discours nationaliste de François Ruffin aux Césars
François Ruffin a participé à la cérémonie des Césars du Cinéma. Cette dernière est diffusée sur “Canal +” appartenant à Vincent Bolloré. Pourtant, on peut dire que le Patron s’inscrit dans la même trame bourgeoise que Bernard Arnault à la tête de LVMH.
François Ruffin est le fondateur et patron du journal Fakir. Sur scène, lors de la réception du prix de meilleur du Meilleur documentaire, il a abordé un T-Shirt “I Love Vincent”, avec la photo de Vincent Bolloré dessus. Le T-Shirt est certes satyrique, mais ne passe pas du tout au vu des différentes manœuvres de remaniements des différentes chaînes de canal+ comme le changement de “I-Télé” en “CNews”, induisant un plan de licenciement massif. Autant dire de l’humour, glorifier un patron comme celui-ci passe particulièrement mal.
Le cadrage, lors de son intervention soulève des questions importantes puisqu’il permet en outre d’effacer aux spectateurs, le T-Shirt lui-même, à l’aide d’un gros-plan. La classe dominante protège ses intérêts. Son discours devant de nombreux millionnaires soulève également de nombreuses questions, tant son intervention appartient au courant nationaliste et réactionnaire.
Son intervention cible les délocalisations dans différents pays. L’avantage comparatif sur différents produits n’est pourtant pas récent, il s’agit avant tout de la théorie de Ricardo. Son livre Des principes de l’économie politique et de l’impôt est écrit en 1817, il y a exactement 200 ans. Au-delà de cette logique, l’idée répandue est que les Polonais, les Roumains ou même les Slovaques volent le travail des Français, puisque leur salaire sont plus faibles. En définitif, il s’agit également d’opposer les travailleurs les uns contre les autres. Il ne revient pas sur le fait que les entreprises LVMH, Whirlpool, Goodyear exploitent de la même manière un Polonais, un Slovaque ou encore Roumain. En définitif, il s’agit d’une “ode” au protectionnisme, mais aussi au Nationalisme de Gauche.
Mon film parle de personnes licenciées car leur entreprise a été délocalisée en Pologne. Au moment où je vous parle c’est une usine d’Amiens, l’usine Whirlpool d’Amiens, qui subit la même histoire parce que ça part là aussi en Pologne. Il y a 15 ans j’étais déjà à Amiens et c’est le lave linge qui partait en Slovaquie, j’ai connu Continental qui est parti en Roumanie, Good Year parti en Pologne. Ça fait maintenant 30 ans que ça dure dans l’ameublement, dans le textile dans la chimie dans la métallurgie et ainsi de suite.
Ensuite, le journaliste tente une comparaison entre les Français et les Roumains dans le domaine du cinéma, après avoir affirmé que cela faisait “trente ans” que les grandes entreprises délocalisent. Sauf que ces dernières ont toujours délocalisé. Il affirme que la mise en concurrence pose “un problème immédiatement”. La question de la concurrence va de paire avec la mise en compétitivité. Les Césars du Cinéma le sont déjà au plan national, tout comme les différents castings au niveau local.
Il évoque d’ailleurs la question du journalisme au niveau des avantages fiscaux, dans sa mise en concurrence avec les autres. Sauf que les grands journaux internationaux sont déjà en concurrence les uns vis-à-vis des autres, notamment dans le cadre de la renommée internationale. Sur le plan national, il y a évidemment une concurrence entre journalistes, puisque les journaux doivent se vendre pour que les journalistes puissent être rémunérés. Dans la crise de la presse, nombreux sont ceux à avoir mis la clef sous la porte.
Pourquoi ça dure comme ça depuis 30 ans ? Ca dure comme ça depuis 30 ans parce que ce sont des ouvrier qui sont touchés et donc on en a rien à foutre. Si c’était des acteurs qui étaient mis en concurrence de la même manière avec des acteurs roumains, ça poserait problème immédiatement. Si c’était des journalistes [Le public applaudit] … quand on touche à l’avantage fiscal ça fait des débats aussitôt, y a des tribunes dans les journaux
Le fantasme de François Ruffin concernant le déménagement d’un des hémicycles répond à l’idée suprême de la question souverainiste, autant dire qu’il s’agit d’une vision proprement nationaliste. Cela a pour vocation de créer une flambée de réactions, dont celles patriotiques. Quant aux ouvriers qu’ils attendent des lois, ils semblent que ces derniers sont plus à même à vouloir en découdre avec le capitalisme. D’ailleurs, les capitalistes édictent les lois (le Parlement est composé de haut-fonctionnaires, universitaires et de CSP+ à plus de 98%), donc le résultat de ces lois ne peuvent que défendre les intérêts de la bourgeoisie, à savoir la classe dominante.
Imaginons que c’est les députés dont on dit qu’ils ne sont pas compétitif. Un député français coute 7100 euros par mois, un député polonais revient 2000 euros par mois. Et encore je suis modéré parce qu’au Bangladesh un député coute 164 euros. Imaginez que demain on dit il faut délocaliser l’hémicycle à Varsovie ? Immédiatement il y aurait des débats et y aurait un projet de loi. Ca fait 30 à 40 ans que ça dure pour les ouvriers et y a pas de projets de loi.
François Ruffin ressort l’expression des “sans-dents” qui a largement été utilisée par l’extrême-droite pour mettre en avant le poujadisme. Les dernières demandent à François Hollande sur son engagement montre bien que ce dernier n’a pour vocation de contrecarrer les idées du patronat, puisque Hollande en a été un des représentants au cours de ce quinquennat. Au final, ce sont des paroles vides en substance montrant sa logique réformiste et nationaliste.
Dans ce pays y a peut-être des sans-dents, mais y a surtout des dirigeants sans cran. Alors maintenant Hollande par exemple il a l’occasion de montrer sur le dernier fil que son adversaire c’est la Finance qu’il peut faire des réquisitions, qu’il peut interdire les produits Whirlpool sur le territoire français, qu’il puisse sortir de l’impuissance et se bouger le cul.
Au final, le discours de François Ruffin se base sur trois axes : nationalisme, protectionnisme et xénophobie.
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