De Calais à Stalingrad, les réfugiés mis à la rue
Les réfugiés de Calais et ceux de Stalingrad sont confrontés au même problème, une grande partie d’entre eux se retrouvent à la rue. Il s’agit d’un dilemme important dans l’Europe forteresse.
L’expulsion de la jungle de Calais se poursuit, le boulevard de Stalingrad compte près de 3.000 réfugiés dormant sous des tentes dans des conditions parfaitement insalubres. Le nombre de réfugiés ne cessent de croitre sur le boulevard longeant le métro 2, depuis que les annonces de l’expulsion de la Jungle de Calais ont été faites. Si le centre d’accueil pour réfugiés géré par l’association Emmaüs était censé ouvrir en mi-octobre, celui-ci a été repoussé. À ce jour, il n’est toujours pas opérationnel. Les réfugiés ont pour vocation à rester entre “cinq à dix jours” selon Anne Hidalgo. Autrement dit, le centre d’accueil aura le même rôle que le CAP (Centre d’accueil provisoire) de Calais, puisqu’ensuite les réfugiés seront orientés vers des CADA ou des CAO. L’un des objectifs du camp est la suppression des “camps de rue”. Manifestement, cela semble bel et bien un véritable échec. Les conservateurs, dont Nathalie Kosciusko-Morizet, ont vivement critiqué le projet : “c’est un nouveau Sangatte à Paris et on a vu ce que cela donnait. Créer un centre de transit, c’est créer un lieu de fixation, c’est créer un appel d’air”. L’argumentation du parti Les Républicains est le même que celui du Front National, ne cherchez pas, il n’y a pas d’erreur.
Si les riverains selon la presse affirment leur colère sur la situation de Stalingrad, il faut tout de même voir que la position n’est pas uniforme. Les pouvoirs publics ne veulent pas prendre leurs responsabilités pour mettre en place une politique digne dans l’accueil des réfugiés. Mais, beaucoup oublient que la dégradation des conditions fragilise en premier lieu les réfugiés laissés sur le carreau. Certains riverains se laissent aller à croire qu’il suffirait d’appliquer les lois. Marc témoigne à 20 minutes que selon lui “il faut appliquer les lois et renvoyer dans leurs pays ceux qui ne peuvent pas avoir le statut de réfugiés, car nous n’avons rien à leur proposer”. La solution de facilité pour certain consisterait à renvoyer les personnes vers des zones où la guerre fait rage, où vers des dictatures ou dans lieux tenus par des organisations terroristes. Autrement dit, les conduire vers la peine de mort reste pour eux une solution de premier choix.
Jeter à la rue des personnes ne semble pas vraiment choquer l’opinion publique. Pourtant, c’est exactement ce qu’il se passe à Calais, comme à Stalingrad.
L’humanitaire se perd dans les méandres de la politique répressive contre les réfugiés, loin du discours officiel du gouvernement concernant l’évacuation de la Jungle de Calais. D’ailleurs, Cédric Herrou sera jugé pour “aide à l’entrée, à la circulation et au séjour d’étrangers en situation irrégulière”. Il n’y a pas vraiment de différence entre la politique de François Hollande et celle de Nicolas Sarkozy. Ces dernières ont pour seul objectif de traquer les réfugiés et d’envoyer devant les tribunaux ceux qui les aident.
Pire, la destruction soulève une question sur l’École Laïque du Chemin des Dunes (ELDM). En effet, la destruction de l’école donnerait un message très fort à l’ensemble des réfugiés, mais aussi des écoliers. Détruire une école, c’est ouvrir la porte de l’obscurantisme, mais aussi assumer pleinement la casse de l’éducation laïque, et donc la casse de l’éducation nationale. L’intégration des réfugiés prend un certain coup de massue de la part des pouvoirs publics.
Mis à jour 30/10/2016 : Manuel Valls a déclaré que “l’Allemagne a accueilli un million de réfugiés, nous nous devons évacuer Calais, traiter la question de Paris la semaine prochaine, avec 2.000 personnes qui doivent être mises à l’abri et qui ont droit là aussi à la protection”. Le fait de s’occuper de 2.000 personnes sur 3.000 présents dans “le camp” conduit inexorablement à l’expulsion et à l’errance de 1.000 personnes en plus. “Le pays des droits de l’Homme, de la déclaration des droits de l’Homme et du citoyenne pourrait pas […] aux yeux du monde, ne pas être capable d’assurer sa tradition d’accueil”. Pour le moment, on a dû mal à voir la stratégie en matière d’accueil …
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