Quand Riss attaque violemment le père de Stromaë
La “une” de Charlie Hebdo (n°1236) a créé la polémique en mettant en avant le chanteur Stromaë en chantant “Papa où t’es ?”, le tout entouré d’un corps démembré. Le dessin de Laurent Sourisseau est censé traiter les attentats de Bruxelles du 22 mars 2016 touchant le hall de l’aéroport de Zavantem et le métro à la station Maelbeek.
Les deux attentats ont fait entre 34 morts et les 200 à 300 blessés. On pourrait penser à première vue que les restes humains sont censés montrer les victimes touchées par les différentes explosions et de la panique des personnes pour retrouver les corps de leurs proches.
Pourtant, un élément important contredit la logique de la caricature. Le Père de Paul Van Haver fut démembré par les miliciens Hutus durant le Génocide au Rwanda en 1994. Dès lors, il est fort compréhensible que la famille de l’artiste soit horrifiée et scandalisée à propos du dessin. L’intégrité physique de l’homme ne peut plus être replacée dans ce contexte. On peut se poser la question si Laurent Sourisseau avait connaissance du drame familial dont a été victime Stromaë. Ce n’est certainement pas le cas.
Une inscription en haut à gauche donne le nom du dessin “La Belgique déboussolée”. On peut dire qu’il s’agit plutôt de la famille de Stromaë qui est déboussolée.
On pourra trouver des raisons de ce décalage terrible entre des personnes démembrées et l’humour, mais je ne suis pas certain que l’on arrive à une conclusion crédible, sauf à comprendre que l’Hebdomadaire ne sera plus jamais comme le 7 Janvier 2015. La tentative des frères Kouachi de disséminer l’ensemble de rédaction a échoué. Ils n’ont pas réussi à retirer la vie de Laurent Sourisseau. Le dessinateur a été gravement blessé dans l’attaque, mais s’en est sorti. Cela laisse des séquelles psychologiques très importantes et change profondément le rythme et le sens de la vie. Si l’Hebdomadaire continue de vivre, on constate que la troisième version de Charlie Hebdo n’est plus ce qu’elle était, le vide a emporté l’ensemble des textes.
Dans tous les cas, nous assistons à nouveau un énième débat sur la liberté d’expression. Deux camps idéologiques s’opposent, les uns sont partisans d’une liberté d’expression totale avec la répression de la moindre critique objective sur les dessins, les textes, les revues, etc. Ces personnes ont une vision de la liberté d’expression à sens unique. Affirmer “je suis charlie” pour empêcher son voisin d’émettre toute critique, revient à un transformer un slogan libéral en un slogan conservateur et réactionnaire. La liberté d’expression s’adresse à tous, c’est bien le problème de ces personnes. D’autres pensent que la liberté d’expression se doit d’être encadrée et que l’on ne peut rire de tout ou dans un contexte bien délimité et borné, comme c’est le cas actuellement par les lois et la déclaration des droits de l’homme.