Le Discours de François Hollande au Congrès de Versailles : sécuritaire et liberticide
Le Président de la République a convoqué, le 16 novembre 2015, en urgence le Parlement réunis congrès à Versailles. Les 9 Attaques terroristes (3 à Saint-Denis et 6 à Paris) du vendredi 13 novembre ont profondément changé la calendrier législatif et politique français.
François Hollande a prononcé un discours, à ce titre, dans le cadre de l’Unité Sacrée devant l’ensemble des parlementaires.
Il s’agit d’un discours fondamental du Président de la République et sa famille politique Social-Libérale. Pendant près de 40 minutes, François Hollande a déployé son plan ultra-sécuritaire et liberticide. Après les attentats de vendredi, la psychose et la frayeur se sont emparées de la population souvent entretenue par des personnes malhonnêtes et dangereuses. De plus, c’est un terreau utile pour développer les théories opposant la Sécurité à la Liberté ou comme affirmait un certain Jean-Marie Le Pen dans une affiche électorale “La sécurité est la première des libertés”.
Il aura fallu 129 morts, des personnes entre la vie et la mort, des centaines de blessés, des milliers de traumatisés, des millions d’endeuillés pour sentir la fuite en avant du tout sécuritaire. N’est-ce pas renié, une partie de nos droits, de nos libertés en laissant la sécurité empiété dessus ? Pire est-ce que c’est donner raison aux pires obscurantistes ? Les reculs des droits fondamentaux et des libertés individuelles sont dans l’œil du viseur des terroristes. Les sauvegarder et les étendre constitue une réponse forte, face à une menace forte et perpétuelle qui concerne notre pays depuis l’invention de la Dynamite par Alfred Nobel.
La France, comme d’autres pays redécouvre le terrorisme. Ce phénomène n’a rien de nouveau. Selon les époques, le contexte change, son intensité évolue. L’amnésie collective en matière de terrorisme s’installe et s’enracine. En 1980, près 14 attentats eurent lieu. La vague d’attentats s’étendit jusqu’en 1989. Le problème concerne l’oubli progressif de certains évènements graves comme l’attentat de la rue de Rennes, de la station St-Michel, de la rue Copernic ou les attentats du groupe de Fouad Ali Saleh ?
La réponse faible et contre productive du Président de la République ne changera strictement rien à la situation.
La critique du discours du Président de la République devant le Congrès de Versailles est censé interpeller les citoyens et les prolétaires sur la dérive sécuritaire du gouvernement.
Daesh attaque pour la deuxième fois la République Française à l’arme lourde. Le mouvement terroriste islamiste attaque aussi d’autre pays :
- Liban : attentat à la bombe dans un quartier de Beyrouth faisant 41 morts et plus de 200 blessés, le 12 novembre 2015. Il a été revendiqué l’État Islamique,
- Kenya : attaque de l’Université de Garissa, faisant 152 morts et des centaines de blessés, le 2 avril 2015. L’attaque a été revendiquée par le groupe islamiste somalien Al-Shabbaab,
- Israël : série d’attaques et d’attentats au couteau par des proches du Hamas,
- Mali : prise d’otages de l’Hôtel Radisson Blu, à Bamako, le 20 Novembre 2015. On compte 21 morts. L’attaque a été revendiquée par Al-Mourabitoune-Al-Qaïda du jihad en Afrique de l’Ouest) et Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).
- Nigéria : attentat Suicide à Kano, le 19 novembre 2015. Le Bilan est de 15 morts et 53 blessés. L’attentat a été organisée Boko Haram (avec pour objectif de fonder un autre califat).
La liste est longue. Il s’agit avant tout de la culture occidentale qui est visée par ces attentats de manière large.
Une organisation terroriste, comme toute organisation politique a besoin d’aides matérielles et financières. Lorsque des états et des partis politiques subventionnent en toute transparence, ces organisations peuvent se développer de manière exponentielle.
Premièrement, la Turquie de Recep Tayyip Erdoğan s’enfonce doucement dans une guerre civile démagogique et populiste. Le Président de la République de Turquie bombarde les positions kurdes sous couvert de lutte antiterrorisme, pour mieux défendre certains groupes djihadistes. L’État Profond Turc se transforme doucement dans la logique du Califat. À Gaziantep, les Islamistes ont pu tranquillement répandre le drapeau de l’État Islamique sans être inquiétés. Il faut dire que les armes traversent tranquillement la frontière pour ravitailler les différentes organisations terroristes. Mais aussi, l’attentat d’Ankara est la conséquence du terrorisme d’État.
Deuxièmement, les monarchies du Golf : Arabie Saoudite, Qatar, Émirats Arabes Unis et le Bahrain ont leur responsabilité dans ces attentats. L’Arabie Saoudite finance par l’intermédiaire de donateurs privés d’après des sources de Wikileaks, différents mouvements terroristes. Dans le même temps, la coalition Saoudienne intervient au Yémen sur fond de conflit religieux et géopolitique. Dans le conflit Syrien, l’Arabie Saoudite soutien les milices islamistes rebelles au pouvoir de Bachar Al-Assad.
Troisièmement, la position de l’Iran comme contre-poids dans la zone géographique subventionne également le terrorisme : le Hezbollah, des groupes chiites irakiens, le Hamas et le Jihad islamique.
La rupture diplomatique devient une nécessité ainsi que le refus de commercer certain produit ou sauf avec une certification de leurs origines.
Article 42, alinéa 7. du Traité sur l’Union européenne et du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne souligne qu’ “Au cas où un État membre serait l’objet d’une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir, conformément à l’article 51 de la charte des Nations unies. Cela n’affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres”. Mais, l’assistance des autres pays ne réglera pas le problème, un soutien diplomatique à la rigueur. La lutte contre Daesh, est une lutte mondialisée.
Si les réfugiés fuient la Syrie et l’Irak, il y a des raisons élémentaires. Le massacre du vendredi 13 est un aperçu de ce qu’il se passe tous les jours dans ces deux pays. En Syrie, la situation est particulièrement complexe, entre le gouvernement sanguinaire de Bachar Al-Assad, le Front Al-Nostra et Daesh, la barbarie fait le quotidien de ces réfugiés. Les terroristes qui réalisent les attentats sur le territoire français, sont de nationalité française, nés sur le sol français.
Maintenant, il est vrai que certaines personnes peuvent être des infiltrés au sein des réfugiés, mais la question fondamentale demeure la suivante : pourquoi risquer sa vie, quand le terroriste peut prendre l’avion ? La fermeture des frontières n’est qu’une hypocrisie puisque cette dernière ne permet de stopper le flux de capitaux vers les zones contrôlées par les organisations terroristes ou sur le compte bancaire des terroristes hors de l’Hexagone.
De même qu’est-ce que signifie la “déconstruction de l’Union Européenne” ? Il s’agit d’une vision décliniste de la société.
L’État d’Urgence a été appliqué par décret par le Président de la République et le Premier Ministre, le soir des attentats. Il s’agit du Décret n°2015-1475 du 14 novembre 2015 portant application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955.
De plus, l’expression “J’ai décidé” s’inscrit dans le contexte de la monarchie républicaine française. L’hyper-Présidentialisme à la Française passe par le contrôle intégral du pays par une seule personne. Dans le contexte suivant, il prend l’ensemble des pouvoirs du Premier Ministre. L’article 20 de la Constitution affirme que “Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation”. Dans le cadre constitutionnel, ce pouvoir émane du gouvernement. Il peut déposer des Projets de Loi sur le bureau de l’Assemblée Nationale ou du Sénat.
Cette réponse sécuritaire aux attaques terroristes met la France dans une impasse. L’atteinte à la liberté de la presse et aux différentes manifestations ou rassemblement artistique s’inscrit dans la fermeture progressive de l’État.
L’Article 11, alinéa 2 de la Loi n° 55-385 du 3 avril 1955 instituant un état d’urgence et en déclarant l’application en Algérie énonce que “Habiliter les mêmes autorités à prendre toutes mesures pour assurer le contrôle de la presse et des publications de toute nature“. La liberté de la presse est une valeur constitutionnelle. La volonté d’empêcher le journalisme et la presse pour faire face aux dérives existantes ne peut que passer par un Projet de Loi bien séparer visant à renforcer la Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, tout en instaurant la codification de la Charte d’éthique professionnelle des journalistes (Code de Déontologie du Journalisme).
De plus, la réforme législative de la loi du 3 avril 1955 devra s’inscrire dans la conformité de la Constitution. À ce jour, la Loi n’a pas fait l’objet de QPC ou d’une saisine des parlementaires. La probabilité des mesures non-constitutionnelles parait importance.
L’article 2 de la Loi fixe L’État d’Urgence par décret à 12 jours, puis la date définitive de cette mesure par une Loi débattue au Parlement. Le Gouvernement de Manuel Valls pense qu’il est nécessaire de modifier la durée effective du décret à 3 mois.
La réaction des autorités françaises de réaliser des perquisitions de jours comme de nuit s’effectuait dans le cadre légal antiterroriste. La loi n° 96-1235 du 30 décembre 1996 relative à la détention provisoire et aux perquisitions de nuit en matière de terrorisme a le mérite d’être claire et de poser les bases.
De plus, une simple codification dans le Code de la Défense pourrait permettre de compléter l’article L2131-1 et d’abroger la Loi n° 96-1235 du 30 décembre 1996.
Les évènements à Saint-Denis sont articulés avec les lois en vigueur et non avec l’État d’Urgence.
L’urgence et la série d’Attentats du mois de janvier et de novembre ne permettent pas d’affirmer que le régime constitutionnel est menacé. Les troubles graves à l’ordre public ne menacent en aucun cas la continuité de l’État. La responsabilité de la Continuité de l’État est certes prévue à l’article 5 de notre Constitution. Il s’agit d’un pouvoir propre. La modification de l’article 36 de la Constitution permettra d’instaurer l’État d’Urgence Permanent (EUP) avec des conséquences majeures sur les droits fondamentaux et les libertés individuelles devraient alerter tous les démocrates. Les droits de l’Homme ne sont pas une constante de négociation comme une autre.
De plus, la question de la durée de l’État d’Urgence ne se poserai plus, puisqu’en viendrai au Président de la République de l’instituer par un simple décret présidentiel contre signé du premier ministre, du ministre de l’intérieur et du Garde des Seaux.
La dérive élémentaire s’appliquera de manière évidente sur les mouvements sociaux dont la critique et la contestation des lois est irrémédiablement interdit par l’État d’Urgence. Autant dire, que les mesures liberticides feront des heureux chez les libéraux pour pouvoir appliquer les lois les plus libérales possibles.
La question des expulsions des “étrangers” représente un problème majeur. En effet, le discours populiste et obscurantiste du moment tend à affirmer qu’il existe un lien entre l’immigration (les réfugiés du terrorisme) et les différents mouvements terroristes. Pourtant, la différenciation doit être faite entre le “réfugié” et “l’immigré à des fins terroristes”.
L’administration à travers la Préfecture peut délivrer une OQTF suite à une refus de titre de séjour après les décisions de l’OFPRA, de la CNDA et du Conseil d’État. Elle peut aussi mettre en application ces mesures.
Toutefois, ces mesures d’expulsion du territoire n’ont peu de liens avec le terrorisme, puisque dans le cadre du terrorisme, ce n’est plus le Tribunal Administratif qui gère le contentieux. Cours des Comptes évaluent à 13 220 euros et la Cimade à 25 000 à 30 000 euros, par personnes.
En matière de répression des actes de Terrorisme, la Cour d’Assise Spéciale possède les compétences de juger une personne. La personne jugée est ensuite incarcérée dans une maison centrale de plus ou moins haute sécurité. Selon l’Arrêt de la Cour d’Assise, la personne peut-être expulsée après avoir purgé sa peine ou être libre sous différentes conditions.
La Constitution est la loi Suprême d’un pays qui permet d’établir la hiérarchie des normes juridiques, la structuration des différents pouvoirs (Législatif, Exécutif et Judiciaire) et les institutions et organisent l’État. Le but de la Constitution n’a pour objectif de réprimer les personnes et les individus, puisqu’il s’agit du pouvoir propre du Juge.
La dissolution des associations ou groupements de personnes dans le cadre du terrorisme ne peut en aucun cas permettre de lutter concrètement contre le terrorisme. L’association de Malfaiteur prévu par les articles du 450-1 du Code pénal servent de Justification à l’application de l’Article L212-1 du Code de la Sécurité Intérieure. Les personnes peuvent être arrêtées dans le cadre de terrorisme, mais l’entreprise de terrorisme individuelle ou collectif prévu par l’Article 421-2 du Code Pénal s’applique aussi. En matière d’apologie du terrorisme est prévu par l’Article 421-2-5 du Code Pénal. Donc la Constitution n’a pas grand chose à voir avec ce qui existe déjà, la mise en application est préférable que les grands discours.
Le Projet de Loi prorogeant l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence et renforçant l’efficacité de ses dispositions possède l’article 6-1. “sont dissous, par décret en conseil des ministres, les associations ou groupements de fait actes […] portant une atteinte grave à l’ordre public, ou dont les activités facilitent cette commission ou y incitent parmi leurs relations habituelles, des personnes à l’encontre desquelles a été prise, sur le fondement de l’article 6, pour des motifs en lien avec les agissements mentionnés à l’alinéa précédent, une mesure d’assignation à résidence, pour des motifs en lien avec les agissements mentionnés à l’alinéa précédent, une mesure d’assignation à résidence”. D’une part, les assignations à résidence sont de l’ordre du pouvoir exécutif à travers les décisions du Premier Ministre et des Préfets, d’autre part le risque de dérive est très grand concernant les assignations à résidence. Les arrêtés préfectoraux ou les décrets se basent uniquement sur des “oui-dire”, ainsi toute organisation ayant une personne assignée à résidence (cela peut-être l’islamiste, le syndicaliste, le communiste, le nationaliste, le gaulliste, etc.) sur le fait qu’il y ait “des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics” peut-être dissous. Qu’est-ce qu’une menace pour la sécurité et l’ordre public ? Le Président ne parle plus de terrorisme, mais de l’ensemble de la société civile.
Ainsi, une personne souhaitant renverser le système de domination bourgeoise et réactionnaire constitue illico presto “une menace pour la sécurité” de l’état bourgeois, tout comme son “ordre public”. Le flou juridique laisse peser une menace certaine, non contre les terroristes, mais contre l’ensemble des citoyens.
Les rythmes de la démocratie sont irrémédiablement transformés, après la fin des trois jours de deuil qui n’ont pas été respectées par l’opposition, tout comme l’absence réelle de l’Union Sacrée tant vantée par le Président de la République. À trois semaines des élections régionales, les populistes oseront affirmer que la sécurité dépend du rôle du Conseil Régional. À plus long terme, la campagne présidentielle a commencé avec une surenchère sécuritaire faite par des personnes ignorantes tout en matière d’arsenal juridique en matière de sécurité des personnes et des biens. Au risque de supprimer, certaines des dispositions des libertés fondamentales, nous allons vers une vie politique plus rigidifiée.
Pendant ce congrès, les parlementaires, le gouvernement, le Président ont chanté la Marseillaise sauf deux élus frontistes.