Vous avez dit « Islamo-gauchisme » ? (1)

Au XXIème siècle, l’expression « Islamo-gauchisme » est utilisée pour permettre un rapprochement idéologique entre l’Islam Politique et la gauche radicale – extrême gauche. Pourtant, son utilisation soulève de nombreuses interrogations et de nombreux paradoxes chez ceux qu’ils l’utilisent.

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Le PIR a trouvé comme allié de choix, l’organisation d’ultra droite (que je qualifie de néo-nazi) Breizh Atao via son responsable : Boris Le Lay.(qui est parti au Japon, pour fuir les condamnations pénales). Les deux organisations d’extrême droite convergent sur l’idée qu’il existe une lutte des races et qu’elles existe. Allons plus loin, les deux organisations partagent également un antisémite profond.

Pour commencer, je vais citer deux personnes appartenant à deux cercles de pensée différents :

  • Alain Finkielkraut l’utilisait dans une tribune dans une Tribune du journal Le Monde affirmait l’existence d’un « mouvement islamo-gauchiste qui est ostensiblement indifférent à la mémoire de la Shoah ».
  • Christine Le Doaré , une militante « féministe » déclare qu’il « a longtemps été mal vu de qualifier d’islamo-gauchiste cette  gauche  qui se pique de vouloir  libérer l’humanité en hiérarchisant les discriminations, en substituant l’islamophobie à la lutte contre le racisme, en rejetant toute critique de l’Islamisme ». Cette longue diatribe consiste à affirmer de manière malhonnête que le PIR (Parti des Indigènes de la République), l’UOIF et d’autres organisations similaires sont d’extrême gauche. La confusion a des alliés de premier rang dans les cercles « progressistes ».

Pour commencer, une ébauche de l’explication du sens de « l’Islamo-gauchisme », il me semble nécessaire de commencer le rapprochement avec la dialectique stalinienne : « Hitléro-Trotskisme ».

Symbole de l'Hitléro-Trotskysme
Symbole de l’Hitléro-Trotskysme

La déroute et la débâcle d’une minorité les a poussé à s’inspirer du Stalinisme. En effet, l’expression « Islamo-gauchisme » s’inspire directement de « Hitléro-Trotskisme ». Les Staliniens considéraient une partie de l’extrême-gauche : les Trotskystes comme des agents secrets du nazisme. Cette logique (sectaire et haineuse) fait partie d’un passé pas très glorieux pour la Gauche dont certains sont issus.

Aussi, la déstalinisation a permis de supprimer ces vieilles expressions venant d’un autre âge. Pourtant, si la gauche stalinienne n’existe plus, mais certains réflexes staliniens restent identiques.

Nous traversons en ce moment une période marquée par le rejet des musulmans (les agressions contre les musulmans sont en hausse). Au fur et à mesure du temps, le musulman est devenu le bouc-émissaire, laissant très loin la critique des intégristes et des partisans de l’islam politique. Les références historiques ont un sens et ce dernier n’est pas forcément favorable à ceux qui l’utilisent en permanence.

De plus, l’expression « gauchiste » est une référence politique au livre de Lénine : « La Maladie infantile du communisme (le « communisme de gauche ») ». Mais, c’est aussi une expression négative pour caractériser « la Gauche » en la considérant comme extrême, rétrograde, mais aussi réactionnaire. Au sein de la Gauche, « le gauchisme » vise les mouvements blanquistes, anarchistes, Luxemburgistes (communiste de gauche), trotskystes. La logique stalinienne se confirme de plus en plus.

De plus, la Gauche possède le caractère républicain et laïc. La laïcité fut une grande bataille de la Gauche et l’est encore aujourd’hui. Jaurès (grand réformiste) a retranscrit un de ces nombreux discours dans l’Humanité notamment le 02 août 1905 : « Démocratie et laïcité sont deux termes identiques. […] Elle [NDLR : la laïcité] respecte, elle assure, l’entière et nécessaire liberté de toutes les consciences, de toutes les croyances, de tous les cultes, mais elle ne fait d’aucun dogme la règle ou le fondement de la vie sociale ».

Effectivement, le raisonnement donne un caractère nouveau à l’islamisme. Les réactionnaires considèrent l’islamisme comme étant une idéologique républicaine et laïque.  Ils affirment en substance qu’il n’y a pas de contradiction entre la République et l’Islam politique.

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Le drapeau des Frères musulmans

Pour toutes ces raisons, l’extrême droite musulmane serait un peu la SFIO de Jean Jaurès (que j’ai cité plus haut).

De ce fait, l’expression « Islamo-gauchiste » pourrait se définir ainsi : extrême droite musulmane de gauche.

Ils nous feraient croire que Jean Jaurès serait le sosie d’Hassan el-Banna (le créateur des Frères Musulmans [FM]), Léon Blum de Amin al-Husseini (grand mufti de Jérusalem, fondateur de la branche des Palestinienne des FM), etc. Finalement, la SFIO était quelque sorte une organisation satellite des frères musulmans. Actuellement, les réactionnaires considèrent la gauche comme la mouvance porte-parole des Ayatollah et des Mollah. Plus récemment, des leaders de mouvement islamistes notoires comme Khaled Mechaal, Hassan Rohani, Mohamed Ould Abdel Aziz représenteraient également la Gauche.

Tout cela n’est que de la foutaise, mais surtout une démonstration du manque de cohérence dans le raisonnement.

Les conservateurs n’ont sans doute jamais lu Marx et sa critique envers la religion. Il affirmait que « la religion est l’opium du peuple ». L’analyse de l’expression dans son contexte est pourtant simple, elle s’attaquait à cette forte d’extrémisme qui régnait. Les marxistes considèrent la religion est « un appareil idéologique d’État ». Or, aujourd’hui  l’opium chez les conservateurs, c’est le bouc-émissaire. Le bouc-émissaire existe depuis tout temps, il permet de trouver un coupable idéal à tous les maux de la société.

C’est pourquoi l’utilisation toujours plus grande de l’expression « Islamo-gauchiste » n’a pas pour but d’établir une critique de fond de la religion musulmane, mais une critique de surface. Ils ne s’intéressent guère à l’islam politique. Prenons le dernier exemple de l’action de Christine Tasin. Cette dernière d’après une source de l’AFP, a essayé d’entrer dans une mosquée enduite de porc (du saint-doux). « Ses mains glissaient, donc elle n’a pas pu ouvrir la porte ».

Ceux qui défendent l’idéologie de ces derniers ont trouvé un point de relai pour leurs discours chez les conservateurs, et ça marche plutôt bien. Ainsi, les partisans de l’islam politique et Christine Tasin possèdent la même idéologie. Ils convergent sur le fond comme sur la forme sur les points suivants : 1/ Ils militent en faveur du rejet de l’autre et du communautarisme, 2/ Ils combattent la République et la laïcité, 3/ Ils sont partisans du Concordat. Par conséquent, les partisans de l’islam politique possèdent le même socle que les islamophobes.

De plus, l’expression porte en elle, le visage du totalitarisme. En effet, l’expression met aussi en avant une seule idée politique : la droite et l’extrême droite. Le spectre politique se ressert doucement autour d’une même idéologie. De ce fait, les seuls partis politiques qui lutteraient pour la « laïcité » seraient ainsi « Les Républicains », le « Front National », le « Bloc Identitaire », etc. Le rempart détruit dès lors le libre choix et le multipartisme.

Ainsi, la vision nationaliste et libérale s’imposerait dans le débat politique grâce à l’argument d’autorité. Elle a pour objectif de défendre la tradition et l’héritage judéo-chrétien créant ainsi une pseudo-laïcité. Or, les différents sites et collectifs qui utilisent cette expression, possèdent volonté farouche de briser la laïcité en s’opposant clairement à l’article 1 de la loi de 1905 : « La République assure la liberté de conscience » et à son article 2 « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte ». La religion est du domaine privé et doit être géré de manière privée, et cela, sans exception.

Ainsi, certaines antennes militent en faveur du Concordat (de 1801). Le plus ironique, c’est qu’ils se font passer pour des militants de la laïcité. De plus, il est à noter que le concordat existe toujours dans deux départements en France : l’Alsace (le Bas-Rhin et le Haut-Rhin) et la Moselle.

De plus, ce sont ces mêmes personnes qui utilisent l’expression « Islamo-fascisme » ou « nazislamisme », par un jeu de sophisme, ils en arrivent à affirmer que « le gauchisme », c’est le « fascisme » et le « nazisme ». On en revient au même Point de Godwin.

Mais au final, les protagonistes usant l’utilisation de l’expression « Islamo-gauchiste » sont-ils des personnes laïques ? Des personnes combattant l’extrémisme religieux ? La réponse est Non.

Maintenant, il peut exister de la confusion chez certaines personnes de gauche. Mais cela reste très minoritaire.

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