Mario Draghi allume un gigantesque incendie entre la BCE et la Grèce
La BCE après une réunion a affirmé qu’elle suspendrait un de ses dispositifs d’aide aux banques grecques. Pour retirer des liquidités auprès de la BCE, les banques ne pourront plus donner comme garantie des obligations d’État Grec.
Elle a déclaré que la « présomption (…) qu’il n’est pas possible à l’heure actuelle d’anticiper une issue positive ». Les banques grecques se voient donc retirer leur principale source de financement : la BCE.
Cette décision est inacceptable, la BCE a outrepassé son mandat en entrant directement dans les affaires internes grecques, mais également en prenant le parti-pris pour un parti politique bien précis : la Nouvelle Démocratie d’Antónis Samaras.
On remarque dès lors que l’idée de l’indépendance de la BCE inscrite dans les différents traités, puisque cette dernière est soumise à un axe politique bien précis. La BCE est positionnée sur l’axe ordolibéral inspirée directement de la Deutsche Bundesbank. Par conséquent, elle a répondu aux injonctions de ces derniers jours de la Banque Centrale Allemande afin que les bénéfices records sur la dette continuent d’asperger les banques allemandes. 40 Mds de profit ont déjà été réalisés. La dette des uns fait le profit des autres, sachant que le profit est la différence entre le taux d’emprunt des titres sur les marchés financiers et du taux des titres grecs, c’est-à-dire en une plus-value de 5-7 %.
Il est essentiel de rappeler que la BCE est une institution qui n’a aucune légitimité démocratique du fait qu’elle n’est élue par personne, et que par conséquent Mario Draghi n’a aucune légitimité pour les pays de l’Union Européenne. Comme le peuple grec a refusé de collaborer avec la troïka (BCE, FMI, Commission Européenne), la BCE tente une manœuvre du “sauve-qui-peut”, en tapant très fort sur la table. La table se renverse, la BCE devra assumer entièrement les conséquences qui s’en suivront.
Il s’agit de faire pression pour qu’Alexis Tsipras abandonne son programme de réformes Keynésienne et donc qu’il rejoigne la politique ordolibérale. Ce chantage doit aboutir aussi à un accord entre la Grèce et les autres pays à une date butoir le 11 février.
Mais ne soyons pas surpris, l’extrémiste libéral Jean-Claude Junker avait déclaré dans le Figaro : « Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens ». Sa phrase à ce jour est une véritable démonstration, que cet ancien ministre des Finances est prêt à tout pour imposer une dictature libérale de type contractuelle n’étonnera pas une personne. D’autant qu’il est responsable de l’aspiration des bénéfices des entreprises dans son pays, lorsqu’il était ministre. C’est pourquoi, pour faire face à ces personnes-là, la constitution est un rempart puisqu’elle permet de réaffirmer les normes juridiques. Il y a la démocratie, les normes juridiques puis les traités européens. L’ordre des normes vient de la pyramide du juriste Kelsen reste en dernier ressort un pouvoir du constituant dérivé.
Après la dictature des Colonels, la république hellénique est confrontée à la dictature des banques. Mais, en souhaitant sortir par la force, la Grèce de l’Union Européenne, Mario Draghi est en train de commettre plusieurs fautes professionnelles et économiques.
Au-delà du côté autoritaire et de l’attaque contre la souveraineté grecque, la BCE est en train de commettre un acte profondément irresponsable puisque cela pourrait engendrer une panique bancaire dont les conséquences pourraient constituer un effet domino partant de la Grèce pour contaminer l’ensemble des pays de la zone euro et hors zone euro également.
Dans cette période de crise financière qui dispose désormais de différents volets : crise des subprimes, crise de la dette souveraine, allons-nous aller vers une crise de la BCE ? Tout est possible, puisqu’on constate que la bourse d’Athènes varie avec certains antagonistes. Cela a provoqué la chute de la bourse d’Athènes de plus de 5 %, ce qui n’est pas dramatique en soi. L’indice spécifique du secteur bancaire grec, quant à lui, s’est effondré de plus de 22 %.
Le choix du peuple grec doit être respecter. Dans le même temps, les bourses Européenne sont pour le moment très stables et profite de la pleine croissance de différents indices, les capitaux sont en train de s’accumuler du fait de la spéculation sur certains produits afin de maximiser la rente de quelques-uns.
Au-delà, du putsch financier qui se joue devant nos yeux, la question de la souveraineté est une question élémentaire. Mais ce putsch était prévisible, le ministre de l’économie l’avait prédit dans une interview :
Si Syriza n’est pas disposé à faire face à la menace de la BCE concernant la fermeture des distributeurs de billets, et de dire au président de la BCE Mario Draghi que celui-ci n’a pas le droit de placer un gouvernement nouvellement élu sous cette menace purement dictatoriale et arbitraire, qui n’est prévue par aucun traité européen ni par le statut de la BCE, et de lui raccrocher au nez, alors il n’a aucune raison d’être élu !
Les gens doivent se préparer à la probabilité d’une telle menace de la part de la BCE, car celle-ci y a déjà eu recours en 2009 en Irlande ; elle l’a déjà fait à Chypre, elle l’a fait ou laissé entendre qu’elle le ferait à la Grèce en juin 2012. Nous savons, depuis le cas de l’Irlande, que la BCE décroche le téléphone et menace un gouvernement élu de fermer les distributeurs de billets.
Angela Merkel et Wolfgang Schaüble ont un simple objectif : si Syriza participe à un nouveau gouvernement, ce gouvernement sera écrasé de manière à ce que, dans l’espace d’une semaine, il souscrive à la logique du 3e mémorandum. Ils préfèrent que ce soit un nouveau gouvernement qui l’applique, en l’intimidant dès les premiers jours ou les premières semaines de son mandat. [1]
La justice grecque doit monter au créneau et commencer à lancer une grande investigation contre Mario Draghi afin qu’il ne soit d’une part plus le bienvenu en Grèce et d’autre part pour essayer de trouver des délits pénaux, comme des conflits d’intérêts. C’est exactement ce que la justice grecque en poursuivant des employés de la Commission de l’UE et quatre entreprises grecques qui auraient mis en place des sociétés fictives dont le but était de siphonner les fonds du programme de l’UE (pour un montant supposé de 25 milliards d’euros).
La BCE tente encore une fois clairement l’intimidation qui avait réussi par deux fois à faire céder les pouvoirs en place : en 2010 en Irlande et en 2013 à Chypre.
[1] Il s’agit d’une prise de parole lors d’un entretien accordé par Varoufakis à la chaîne privée Ant1 ; http://youtu.be/g3m8LxjlD4w