Kobané résiste à Daech, alors que la Turquie s’embrase

07-10-14-diyarbakir-10

Dans un contexte d’extrême tension en Turquie entre l’AKP et la minorité se met en marche une réelle révolte au sein de l’ancien empire ottoman. Le tout est articulé autour de la bataille de Kobané. Elle a lieu à 5 kms de la frontière Turque.

De loin, quand on regarde les actes du gouvernement turc, on a de quoi être déboussolé, mais en réalité, le pouvoir islamiste s’arrange particulièrement de ce qui se passe de l’autre côté de la frontière.

L’État Islamique bombarde Kobané et l’AKP réprime la résistance et le soutien pour Kobané. Pour montrer sa confusion et son faux-jeu, Erdogan a déclaré : “Daech et le PKK, c’est la même chose” pour mieux protéger sa ligne de défense qui consiste à faire tomber Bachar Al Assad quitte à mettre en avant l’Etat Islamique à la place de l’Irak. Mais les civils prisonniers de Daesh sont comme Daesh selon RTE. Ainsi, les victimes de l’organisation terroriste doivent être éliminées selon RTE, d’où la répression contre ceux qui résistent pour faire tomber la prise de pouvoir de Daesh à Kobané.

Dans ce contexte, le laisser-faire et la non-intervention du pouvoir ottoman est une prise de position. En effet, en refusant toute participation pour déloger les terroristes islamistes de Kobané, aussi la volonté de laisser le massacre se faire s’inscrit dans une volonté de démolir l’opposition. Comme, on le sait Erdogan et le renseignement n’est pas innocent dans cette situation, puisqu’il livre des armes pour les groupes islamistes en Turquie.

Cette volonté de renforcer les mouvements islamistes (dont le terrorisme) et de casser l’opposition laïque s’inscrit dans la continuité des prises de position du Chef de l’AKP, et cela, depuis les évènements répressifs de la Place Taksim et de l’occupation du parc de Gezi. Pour que le pouvoir islamiste de RTE ne cède pas, la solution autoritaire conservatrice et obscurantiste apparaît comme nécessaire, d’où la transformation progressive du régime vers le modèle hyper-présidentiel.

Cependant, un problème de grande ampleur se pose. Si la Turquie est membre de l’OTAN, comment se fait-il que les membres de l’AKP puissent soutenir largement Daesh ? Il s’agit d’une contradiction, puisque si l’OTAN lutte contre l’organisation terroriste présente en Syrie et en Irak, le parti au pouvoir en Turquie contribue à soutenir le terrorisme islamiste. Si l’OTAN n’est pas un enfant de cœur, la logique voudrait que le pays soit expulsé de l’organisation militaire, sauf que sur le plan diplomatique, cela apparaît impossible.
Comment se fait-il que des sanctions diplomatiques et financières n’aient pas été prises contre ce pays, car si la communauté internationale condamne l’Arabie Saoudite, le Qatar ou les Émirats Arabes Unis, il n’empêche que le parti au pouvoir en Turquie rejoint le même ban. Bien sûr, je ne parle pas du peuple turc qui face à l’avancée de l’état islamique a beaucoup à perdre. En Turquie depuis quelques jours, la situation est au bord de la guerre civile, si ce n’est pas une bonne nouvelle, cette menace est bien réelle à l’entrée de l’Europe. La stratégie du premier ministre turc est purement suicidaire, le pouvoir islamiste dérange aussi la communauté internationale par ses prises de position. De ce fait, il devient nécessaire de faire le rapprochement Daech et l’AKP. Le nouvel état profond turc est basé sur “les barbes à papa” et “le djihadisme”. Sous une forme argumentée, en mettant en avant le curseur sur l’ensemble des slogans des partisans de l’AKP en faveur de Daesh.

Maintenant, il est certain que de gazer les Kurdes, les assassiner de manière méthodique ne fera pas repousser Daech, ne fera que renforcer l’organisation terroriste.

Une des revendications du PKK, légitime et juste, est l’ouverture du corridor entre la Syrie et la Turquie, pour permettre l’évacuation des blessés et l’envoi de Kurdes sur le front. Il s’agit dans le fond d’une manœuvre humanitaire, sinon les kurdes seront pris en étaux et seront massacrés. Si cela devait être le cas, Erdogan devra répondre de ses actes tôt ou tard, même si la Turquie en tant qu’état n’a pas signé et ratifié les statuts de Rome.

Mais dans ce contexte, quoi qu’on en dise, la résistance Kurde à Kobané impose un minimum. En effet, loin de toute attente, de toutes les prévisions politiques la ville est toujours debout, quartier par quartier, rue par rue, la ville se défend du pot de terre contre le pot de fer, mais à la fin nous savons très bien que le pot de terre l’emportera contre le pot de fer. Cet héroïsme intervient à un moment stratégique, un moment où les revendications kurdes n’ont jamais été aussi fortes, mais il est très réaliste d’affirmer que le peuple est bel et bien le dernier rempart au fanatisme de Daech. Les Kurdes sont divisés sur plusieurs pays. Mais loin de la mise en place de la découpe régionale comme nous le savons, le Kurdistan a quasiment une existence politique. Le pot de terre réussira, Kobané tient depuis le 15 septembre soit plus de 25 jours, la ville aurait dû être prise en un ou deux jours maximum. Par cette ténacité, on entend déjà les références à Stalingrad. Il est certain que cette bataille changera la progression de Daech en Syrie et Irak. C’est un moment historique à n’en pas douter, l’histoire moderne s’écrit à Kobané.

Il convient aussi de ne pas intégrer le PKK dans la liste noire des groupes terroristes. Au vu de ce qu’il se passe, le PKK lutte sérieusement contre le terrorisme de Daech. L’Union Européenne et les États-Unis d’Amérique ne pourront fermer les yeux plus longtemps. Un appui militaire est nécessaire, notamment par des livraisons d’armes adaptées, il y a le feu à la maison, comme on dirait.

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