Gardons la mémoire vivante du groupe « Manouchian » comme symbole de résistance contre la xénophobie

affiche-rouge-fIl y a soixante-dix ans, le groupe « Manouchian » était fusillé pour acte de résistance au Mont-Valérien, à l’Ouest de la Capitale. Cette figure incarne l’héroïsme de la résistance internationale en France face au nazisme.

Une figure de la résistance

Manouchian et ses camarades ont fait trembler la France Vichyste et le Troisième Reich. Ils avaient fui l’Espagne de Franco, l’Italie de Mussolini ou le génocide arménien. La France a été pour eux, le pays qui les a forgés et qui leur a donné le gout de l’émancipation et de la résistance.

Deux personnes du groupe échappèrent aux arrestations de Brigade Spéciale ( Police française travaillant en étroite collaboration avec les polices allemandes. ). Le secteur n°2 était spécialisé dans la traque des communistes. Au matin du 16 novembre 1943, Manouchian est arrêté en gare d’Évry Petit-Bourg. 67 arrestations suivront dans le cadre du démantèlement du FTP-MOI parisien.

Ces jeunes résistants ont préféré sacrifier leur vie pour que puisse vivre la République Française et mettre à terme le nazisme et vichysme. « La mort n’éblouit pas les yeux des Partisans » mettait en vers Louis Aragon. Le poème intitulé au départ Strophes pour se souvenir a largement été popularisé sous le nom de l’Affiche Rouge : « Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes ». Léo Férré l’a chanté de la plus belle des manières pour que puisse vivre la mémoire de ces résistants.

Manouchian dans sa dernière lettre à sa femme prend conscience de ce qui lui arrive : « Cela m’arrive comme un accident dans ma vie, je n’y crois pas, mais pourtant, je sais que je ne te verrai plus jamais ». C’est cette humanité qui l’a poussé à répondre de la manière la plus franche face au tribunal militaire allemand le 19 février 1944 : « Vous, je n’ai rien à vous dire. J’ai fait mon devoir qui était de vous combattre. Je ne regrette rien de ce que j’ai fait ». Il termine par ces mots : « Je mourrai avec mes 23 camarades tout à l’heure avec le courage et la sérénité d’un homme qui a la conscience bien tranquille, car personnellement, je n’ai fait de mal à personne ». Elle fut écrite le 21 février 1944 à la prison de Fresnes quelques heures avant son exécution.

L’arménien et 21 de ses compagnons tombèrent sous le poids des balles, la seule fille du groupe fut décapitée en Allemagne. Le FTP-MOI (Main d’Œuvre Immigrées), branche communiste de la résistance contre l’occupant nazi et la collaboration vichyste, a laissé au cours de l’occupation des milliers de vies. Il est juste de rappeler au moment où les commémorations se font, que 70 % des résistants fusillés étaient des « communistes » du réseau Francs-tireurs Partisan.

L’Affiche Rouge est imprimée en 15 000 exemplaires par le service de propagande nazi sous deux formats : 152 × 130 cm, et 118 × 75 cm. L’affiche aurait été placardée dans toutes les villes et villages entre sa condamnation et son exécution. Dix personnes au sein du groupe sont sélectionnées pour la composition de l’Affiche rouge, d’où il apparaît l’expression « l’armée du crime ». La dernière fait référence au fait que le groupe assume totalement ses actes : la froideur des réponses. Toutefois, l’effet souhaité n’a pas été celui prévu, puisque l’affiche servira d’hommage à un héros de la résistance par le peuple français dans sa diversité. De nombreux bouquets de fleurs y seront déposés de manière clandestine.

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La mémoire de la résistance aujourd’hui

Au moment où le Président de la République a décidé le rapatriement des cendres vers le Panthéon. Pour autant, l’hommage populaire n’est pas nécessairement du goût de la présidence, aucun résistant « communiste » n’y a été nommé. Toutefois, les nommés ont leur place au sein du Panthéon. Pierre Laurent, Secrétaire National du PCF s’interroge de manière claire à ce sujet  « Comment honorer la Résistance sans que des militant(e)s de la principale force qui combattit le nazisme en France ne trouvent la place qui leur est due ».

Cet hommage intervient à un moment très particulier en France comme en Europe. La montée de la xénophobie nous rappelle un peu plus le cul-de-sac dans laquelle elle est tombée pendant l’entre deux guerres. Les boucs émissaires redeviennent à la mode pour les faire accuser tous les maux de la société capitaliste.

Une lettre ouverte a été écrite Jean-Marc Germain (député des Hauts-de-Seine) dans laquelle il affirme son souhait de placer le groupe Manouchian dans le Panthéon : « Car si ces ” Grands Hommes ” ont reçu pour signe de gratitude de la République d’être inhumés au Panthéon, les membres de l’Affiche Rouge exécutés au Mont-Valérien attendent toujours, dans leur cimetière d’Ivry, la reconnaissance officielle de la Patrie. Leur place est auprès de ceux qui les ont précédés car ils incarnent ceux qui, dans l’ombre, dans l’oubli de soi-même et parfois au prix du mépris, se battent pour que la France reste fidèle à elle-même. »Cette lettre est sur la même teneur que la position de Pierre Laurent.

Lorsque le Front National augmente, la mémoire collective peut être le meilleur moyen de faire reculer l’extrême droite. Le travail est individuel au service de la société. En montrant, à quoi ressemble l’extrême droite depuis 1922, nous pourrons faire reculer les idées du clan Le Pen tout en rappelant que leur programme est dans la lignée stricte de ce qui se faisait avant.

Pierre Le Bec

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